
Vous l’avez sans doute remarqué : les seins nus se font rares sur les plages et dans les publicités. Là où les années 70 affichaient fièrement le topless comme symbole de libération, notre époque semble préférer les fessiers instagrammables aux poitrines libérées. Plus pudique, notre société ? Pas vraiment. On vit dans un monde où les corps sont surexposés mais rarement acceptés tels qu’ils sont. Le nu s’affiche partout, mais c’est un nu lisse, filtré, calibré. Un nu performant, pas vulnérable.
Et pourtant, ce malaise n’est pas nouveau. Depuis l’Antiquité, la nudité est indissociable d’un idéal de perfection : le corps grec, symétrique, athlétique, était le standard du bon citoyen. À Rome, lorsqu’on commence à représenter des corps nus de manière réaliste — avec leur âge, leurs plis, leurs défauts — cela choque : trop vrai, trop humain, il est préférable que la nudité reste un code, pas une réalité. Elle est déjà très politique : seuls certains corps peuvent être nus, les autres doivent se cacher.
Aujourd’hui encore, ce clivage persiste. Et pourtant, passé 45 ans, le rapport au corps change. Moins d’exhibition, peut-être. Mais souvent plus d’acceptation. Une cicatrice devient une histoire. Une tâche, un souvenir. La peau cesse d’être un argument de séduction pour devenir un manifeste de liberté. Se mettre à nu, ce n’est plus chercher à plaire, c’est se réconcilier avec soi.
Anne et Charlotte, qui aiment se poiler sans être à poils
L'HISTOIRE DE LA NUDITÉ... DÉVOILÉE !
Dans l’Antiquité grecque, elle est codifiée : seuls certains corps peuvent se dévoiler. Le jeune homme citoyen, au corps athlétique, est montré nu dans les compétitions ou les statues : sa chair est le miroir de la vertu civique. Les autres ? Femmes, vieillards, esclaves, restent habillés ou moqués.
À Rome, la nudité réaliste des statues — comme celles de certains généraux représentés nus à la grecque mais avec leur vrai visage ridé — déroute. On préfère les corps idéalisés des dieux. Le corps nu devient un marqueur : celui du pouvoir, de la vertu, ou de la marginalité. Être nu, c’est prendre position. Montrer ou cacher son corps devient un acte politique.
Plus tard, les explorateurs européens fantasment sur la nudité de l' »Autre ». Le « bon sauvage », nu et innocent, est à la fois admiré et rabaissé. Fascination et répulsion se mêlent. La peau nue devient le symbole d’une civilisation à conquérir.
Et dans les années 1930, le naturisme européen se veut hygiéniste et médical. Il s’inspire des théories naturistes allemandes du XIXe siècle : la nature guérit, le corps nu est un vecteur de santé, de morale et d’harmonie. Les médecins naturistes préconisent d’exposer le corps à l’air, au soleil, à l’eau — convaincus que l’environnement naturel purifie et soigne. La nudité devient alors un outil de discipline physique et mentale, loin de toute sexualisation.
Mais dès les années 1980, le regard change. Le naturisme recule : selon la Fédération française de naturisme, la fréquentation des plages naturistes chute de 30 % en 20 ans. Le topless aussi décline, passant de 40 % des femmes sur les plages dans les années 80 à moins de 10 % aujourd’hui, tout cela étant affaire de cycles et de mode (celle du moment étant plutôt aux tatouages qu’aux seins nus).

3 NUS DANS L'HISTOIRE DE L'ART

POUR ALLER PLUS LOIN

Lire l’article de Elle : Sophie Fontanel pose nue et reçoit des milliers de « Merci »