Luca : le dernier ancêtre commun

Il y a un peu plus d’un an, nous vous parlions de généalogie : retrouver l’arrière-arrière-arrière-grand-tante Lucette, mettre des noms sur de vieilles photos, et parfois tomber sur un cousin perdu qui habite à trois rues de chez vous, lire cette Noldletter ici.

Aujourd’hui, on vous propose de continuer cette enquête… mais beaucoup plus loin : 4,2 milliards d’années plus loin : avant Lucette, avant Lucy, avant les dinosaures, avant la première feuille, la première méduse, le premier poisson.

Tout au bout de la piste, il y a LUCA, un acronyme en clin d’oeil à Lucy qui signifie : Last Universal Common Ancestor, l’ancêtre commun à tout ce qui vit aujourd’hui sur Terre : vous, nous, les pandas, les microbes, les artichauts, les palmiers, les huîtres… tout.

Grâce aux avancées de la génomique, les scientifiques viennent d’en dresser le portrait le plus précis à ce jour. Ça nous a scotchées, on vous raconte…

Anne et Charlotte, qui creusent toujours plus loin.

LA PENSÉE DU JOUR

1760021388

TEST & NOLD

LUCA, NOTRE PLUS VIEIL AÏEUL

Un âge vertigineux

Les chercheurs ont daté LUCA à 4,2 milliards d’années ! La Terre elle-même n’a que 4,5 milliards d’années. Cela veut dire que cet ancêtre vivait presque dès que les conditions étaient réunies pour que la vie apparaisse. Ses gènes sont plus vieux que tous les continents, océans et montagnes visibles aujourd’hui.

Un ancêtre plus complexe qu’on ne pensait

Son ADN contenait déjà des systèmes de défense contre les virus, une sorte de système immunitaire archaïque.

Il n’était pas seul. LUCA évoluait dans un écosystème grouillant d’autres micro-organismes primitifs. Imaginez une communauté microscopique au fond des océans, échangeant des gènes comme on échange des recettes : un phénomène appelé transfert horizontal de gènes.
Contrairement à nous, qui transmettons notre ADN de parents à enfants (“verticalement”), certaines bactéries et archées échangent directement du matériel génétique entre voisins (“horizontalement”). Résultat : un véritable marché noir génétique, où les innovations passent de cellule en cellule, brouillant les pistes pour reconstituer un arbre généalogique clair.

Les archées, les bactéries… et nous !

Après LUCA, le vivant s’est scindé en trois grandes branches :

– Les bactéries : omniprésentes, de votre bouche au fond des océans.

– Les archées : elles ressemblent aux bactéries mais sont aussi différentes d’elles que nous le sommes des champignons. Elles prospèrent dans des environnements extrêmes : sources brûlantes, lacs hyper salés, fonds volcaniques marins.

– Les eucaryotes : la “team” à laquelle nous appartenons, avec les animaux, les plantes et les champignons. Leur point commun ? Des cellules avec un noyau qui protège l’ADN.

Nous, les eucaryotes, avons divergé plus tard, mais nous partageons encore avec les bactéries et les archées certains gènes hérités directement de LUCA. Autrement dit : vous êtes cousins aussi bien avec un cèdre du Liban qu’avec une bactérie des sources chaudes d’Islande.

Comment on l’a retrouvé :

Retrouver LUCA, c’est un peu comme chercher la première page d’un livre… alors qu’on en a perdu presque toutes les pages et que certaines ont été réécrites par d’autres auteurs.

Pour y arriver, les scientifiques comparent les génomes d’innombrables bactéries et archées, à la recherche de gènes inchangés depuis des milliards d’années. Ils utilisent aussi des horloges moléculaires : l’ADN accumule des mutations à un rythme régulier, ce qui permet d’estimer quand deux lignées ont divergé. Mais à une telle profondeur temporelle, ces horloges deviennent imprécises. L’équipe de Bristol a donc “recalibré” l’horloge en se basant sur des duplications de gènes survenues avant LUCA. Cette méthode réduit les erreurs et donne une datation plus fiable : 4,2 milliards d’années.

JUST NOLD IT

CE QUE CETTE DÉCOUVERTE NOUS APPREND AUSSI (ET SURTOUT ?)

Une leçon d’humilité

Certains morceaux de notre ADN sont plus vieux que l’Himalaya. On les partage avec les artichauts, les huîtres et les bactéries intestinales. La prochaine fois que vous dites “on n’a rien en commun”, vérifiez vos gènes.

Un rappel d’unité

Si LUCA est notre ancêtre à tous, alors la vie sur Terre n’est qu’une seule grande famille, éclatée en millions d’espèces. Les frontières, les races, les identités… tout ça est arrivé bien après.

Une idée de paix

Dans nos arbres généalogiques humains, on finit toujours par croiser un ancêtre commun avec son voisin. LUCA nous rappelle que cette parenté ne s’arrête pas à notre espèce.

Peut-être que si on avait tous conscience qu’on descend de la même petite cellule à moitié vivante qui barbotait dans une cheminée hydrothermale, on se battrait un peu moins pour des bouts de territoire, et on s’émerveillerait un peu plus devant ce miracle partagé…

POUR ALLER PLUS LOIN

1748337878

Regarder la vidéo d’Antoine Taly, chercheur au CNRS, qui nous explique à quoi ressemblait LUCA

unnamed (67)

Regarder la 2ème partie de la vidéo

1745916417

Marcher en écoutant Deep Time Walk, une balade contée sur 4,6 kms pour parcourir les 4,6 Millions d’année de la terre (application en anglais)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *